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La socialisation différenciée Inévitablement, l’être humain divise les gens en groupes. Ceux-ci peuvent être basés sur différents critères : l’origine ethnique, la religion, la profession, l’âge... Cependant, la catégorie la plus fondamentale semble être le sexe. Quand nous rencontrons une personne, nous sommes en général capables de déterminer son sexe et nous ne pouvons pas nous en empêcher. Cette division du monde en deux, hommes et femmes, nous amène à penser que les hommes sont semblables les uns aux autres, comme les femmes sont semblables les unes aux autres. En réalité, il y a un grand recouvrement entre ces deux catégories, mais la socialisation renforce l’écart entre les genres en polarisant les différences, emprisonnant chacun/e dans des rôles spécifiques, très difficiles à faire évoluer. Stéréotypes Un stéréotype est une forme de croyance que nous avons au sujet de personnes qui partagent la même appartenance groupale, comme par exemple quand nous affirmons que les Allemands sont sérieux ou les Français chauvins. Les stéréotypes peuvent être positifs ou négatifs et sont le plus souvent descriptifs : ils expriment les traits ou les comportements que nous pensons typiques des membres du groupe. Une éducation différenciée Les parents traitent leurs enfants différemment selon qu’ils sont garçons ou filles. Dès qu’on connaît le sexe du bébé à venir, sa chambre et ses vêtements prennent les couleurs prescrites et on lui achète des jouets correspondant à sa « nature ». Les parents projettent les activités qu’ils pourront réaliser avec l’enfant suivant son sexe et, souvent, l’un des deux sexes est souhaité plutôt que l’autre. Une étude montre que 24 heures après la naissance, les parents s’attendent déjà à ce que des comportements différents apparaissent chez leur nourrisson en fonction de son sexe. Plus tard, ils encourageront la participation de leur bambin à des activités typées, comme les poupées pour les filles et les petites voitures pour les garçons. Ce traitement différencié a des répercussions tout au long de la vie. Comme il commence tôt et est acquis très rapidement par l’enfant, il est naturalisé : les différences sont comprises comme innées, biologiques, alors que de nombreux mécanismes psychologiques d’apprentissage peuvent les expliquer. La pression normative Deux types de pressions peuvent ainsi s’appliquer à l’enfant : la pression normative s’exerce lorsqu’une personne s’écarte de la norme, de ce qu’on attend d’elle, ou quand au contraire, elle s’y conforme. Dans un cas, il y aura punition, dans l’autre, récompense. Dans l’enfance, on nomme ce premier processus le renforcement différencié : on va par exemple encourager le petit garçon à courir et sauter et se dépenser, notamment en lui mettant des vêtements adaptés à ce type d’activités, on va lui retirer la poupée de sa sœur quand il la prend et le féliciter quand il a été courageux ou fort. Par contre, on va encourager la petite fille à jouer calmement avec ses poupées en l’engonçant dans une jolie robe qu’il ne faudrait surtout pas abîmer, on va lui demander d’aider maman à la cuisine et la féliciter parce qu’elle est très jolie. La récompense pour se conformer aux stéréotypes est souvent l’approbation sociale. Le désir d’être aimé amène ainsi les enfants à devenir ce qu’on imagine qu’ils sont « naturellement ». Le modelling différencié La pression informationnelle fonctionne autrement. Dès trois ans, l’enfant a compris qu’il appartenait à un des deux sexes, et que ces sexes étaient liés à des choses particulières : dès l’école gardienne, les petits garçons et les petites filles sont capables de classifier un nombre impressionnant d’objets, jouets, occupations et vêtements comme étant féminins ou masculins. Avant 7 ans, les enfants réalisent également que l’appartenance à un sexe est stable et constante. Quand cette identification est réalisée, l’enfant commence à utiliser son environnement, ce qu’il observe, pour en apprendre plus sur qui il est et ce qu’il doit faire. Plus particulièrement, l’enfant observe les modèles du même sexe que lui et adopte leurs comportements, goûts et attitudes. C’est ce qu’on appelle le « modelling » différencié. Ainsi, si maman fait la vaisselle, et papa tond la pelouse, les ambitions des petites filles et garçons vont reproduire ces observations. De plus, l’enfant met en place une forme de pression normative personnelle : il est capable de s’auto-réguler pour correspondre à son genre. Ces deux processus ne se limitent bien évidemment pas à la sphère familiale, et de nombreuses influences parfois incontrôlables viennent jouer leur rôle dans la socialisation de l’enfant. Les intentions les plus égalitaires peuvent être balayées par l’impact de la télévision ou la littérature pour enfants, par les attitudes des pairs ou des professeurs à l’école, par les mille et une voies qui encouragent la reproduction des différences de genre. Car la socialisation précoce rend évidemment ces stéréotypes vrais, dans le sens où, en moyenne, les femmes et les hommes correspondent effectivement à leurs stéréotypes respectifs. Impact de la socialisation différenciée Le problème de la socialisation différenciée se pose de manière aiguë dans le domaine de l’informatique. En effet, la sphère technologique est traditionnellement associée au masculin, et dès 4-5 ans, les enfants, filles et garçons, associent l’objet « ordinateur » aux garçons. Historiquement, la machine informatique se crée dans un univers avec des valeurs et des objectifs liés au rôle masculin. De plus, cette discipline est liée aux mathématiques et à l’ingénierie, deux domaines où les hommes seraient soi-disant naturellement meilleurs que les femmes. L’informatique est perçue comme froide, rationnelle, logique et l’informaticien type (le « hacker ») comme un être asocial et négligé, aux antipodes du rôle féminin qui requiert contacts humains et émotions ! Pour les filles, s’intéresser à l’ordinateur devient dès lors une transgression de leur sexe, découragée par autrui, mais aussi par elles-mêmes : en aimant l’informatique, elles s’éloignent de la féminité, créant un conflit identitaire. De plus, dans leur environnement, elles risquent d’observer que ce sont les hommes qui utilisent majoritairement les ordinateurs et pas les femmes. Pression normative et pression informative les guident loin de la machine. Des chances inégales De nombreuses personnes estiment que la différenciation de genre qui s’opère ainsi est une bonne chose, qu’elle permet aux hommes et aux femmes de se répartir les rôles, qu’elle facilite la vie des individus en identifiant clairement pour eux ce qui est adapté à leur genre et ce qui lui est étranger (et souvent indésirable). Eléonore Seron
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