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Diversité et responsabilité sociale : les entreprises qui jouent la carte de l’ouverture. Alors que les chiffres attestent que la discrimination à l’embauche est encore une réalité dans notre pays, certaines entreprises prennent le parti de jouer la carte de la diversité, revendiquant le caractère mélangé de leurs employés. D’autres font volontiers référence au concept de Responsabilité Sociale. Mais que signifient vraiment ces termes, et en quoi sont-ils bénéfiques à la fois aux entreprises et à la lutte contre les inégalités sociales ? Ada se penche sur la question. Une discrimination dénoncée mais présente
La discrimination à l’embauche, le fait de rejeter quelqu’un sur des bases autres que ses réelles compétences professionnelles, est toujours d’actualité en Belgique (1), (2). On pense bien sûr à la discrimination ethnique, mais la discrimination a également d’autres visages : les gens sont exclus à cause de leur sexe, de leur religion, leur poids, leur âge, leur orientation sexuelle, leur physique, un handicap, une histoire personnelle ou médicale (3), une invalidité, parce qu’ils sont chômeurs, et pour mille et une autres raisons encore. La diversité ou la richesse dans la différence
La notion de diversité, dans le cadre de l’entreprise, désigne le fait de valoriser l’embauche de personnes d’horizons différents, que ceux-ci soient culturels ou individuels, liés au genre, à l’origine ethnique ou au profil, simplement. Dans la société actuelle, dite de l’information, la valeur principale pour l’employeur est devenue le savoir : en diversifiant son personnel, on accède à une information multiple, on brasse de nouveaux regards, de nouveaux points de vue, de nouvelles compétences, des goûts, des manières d’appréhender les problèmes... In fine, la rencontre des différences permet une innovation et une créativité bouillonnantes, parce que nourries d’angles complémentaires. En gros, chacun apporte sa pierre à l’édifice. En plus des compétences liées au travail, les employés sont valorisés pour leurs qualités et perspectives uniques et personnelles. Cette valorisation des individus pour ce qu’ils sont est supposée amener une meilleure ambiance de travail, et par là moins d’absentéisme, moins de turnover (7), et une motivation plus forte. D’un point de vue plus économique, la diversité a des avantages en termes de connexion avec les clients et la réalité sociale qui entoure les entreprises. En effet, les clients potentiels des entreprises sont devenus diversifiés eux aussi. Avoir dans son staff des personnes semblables à celles qu’on essaie de toucher peut faciliter la communication et la compréhension que l’entreprise a des besoins et des envies de ces groupes. Les clients de certains groupes peuvent aussi préférer avoir affaire à des personnes qui leur ressemblent dans les interactions commerciales. De plus, et nous y reviendrons, présenter son entreprise comme ouverte et tolérante peut avoir des retombées positives en terme d’image. La diversité est devenue aujourd’hui un concept en vogue, surtout aux Etats-Unis où fleurissent des consultants en management de la diversité qui proposent des formations aux cadres et employés, afin de les aider à exploiter au mieux les richesses de leurs collègues. Cependant, il ne faudrait pas ignorer qu’elle peut parfois être synonyme de renforcement des stéréotypes. En effet, si on engage des femmes parce qu’on pense qu’elles sont compréhensives, des Allemands parce qu’ils sont sérieux, des jeunes parce qu’ils sont pleins d’enthousiasme, on préjuge à nouveau des caractéristiques des gens uniquement parce qu’ils appartiennent à un groupe. Embrasser la richesse d’un individu au travers de ses caractéristiques propres, correspondant ou non à l’idée qu’on se fait de son groupe d’appartenance, semble une meilleure manière d’exploiter la diversité. La « RSE » ou l’éthique de l’entreprise Le concept de Responsabilité Sociale de l’Entreprise (RSE) est plus large que celui de diversité et renvoie à l’idée que de par leur pouvoir dans la société d’aujourd’hui, les entreprises ont une certaine responsabilité vis-à-vis des gens, au moins à deux grands niveaux : écologique et social. Liée au concept de développement durable, la RSE signifie qu’une entreprise ne peut se contenter de se soucier de sa rentabilité économique. Les six grands domaines que recouvre l’idée de RSE sont l’environnement, les ressources humaines, le gouvernement d’entreprise, les pratiques commerciales, l’impact local et la citoyenneté. On distingue aussi la responsabilité interne, qui concerne principalement les salariés de l’entreprise, de la responsabilité externe. La responsabilité interne implique un certain investissement dans le capital humain, les questions de santé et de sécurité, la gestion du changement, et de soucis environnementaux dans les questions de production. La dimension externe concerne la communauté au sens large, et les parties prenantes tels que les fournisseurs, les pouvoirs publics, les ONG, ainsi que l’environnement.
Si des entreprises respectant une charte de Responsabilité Sociale apparaissent bénéfiques pour le grand public, il existe aussi un certain nombre de bonnes raisons plus économiques (pour l’entreprise, donc) pour s’engager dans ce type de démarche. De manière générale, les entreprises dépendent de la bonne santé des communautés qui les accueillent. Ainsi, les salariés sont recrutés dans la population locale, et les entreprises ont donc intérêt à ce que les qualifications dont ils ont besoin y soient directement présentes. De même, les PME surtout, trouvent leurs clients directement dans cette même communauté locale. La réputation qu’une entreprise a sur son site influence donc directement sa compétitivité. Indirectement, l’entreprise peut améliorer son efficacité en découvrant de nouveaux modes de production, en gaspillant moins, en s’intégrant dans des créneaux autrefois inexistants (on pense par exemple à l’épargne éthique, le commerce équitable...). Mais de plus en plus de gens (clients, actionnaires, personnel, managers) désirent que les entreprises respectent leurs valeurs personnelles et c’est là que réside l’avantage principal de la Responsabilité Sociale pour les entreprises, dans une question de réputation. D’un point de vue promotionnel, c’est une arme redoutable et efficace. Une entreprise propre, éthique, citoyenne, vend mieux et réduit le risque de se voir attaquer par les gouvernements, les ONG ou les associations de consommateurs. C’est pourquoi une entreprise qui fait dans la Responsabilité Sociale le publicise souvent un maximum : c’est une question d’image de marque. On peut dès lors se poser la question : qu’est-ce qui compte le plus ? Les causes ou le résultat ? Sans être dupes, on peut malgré tout se réjouir de ce résultat, qui est après tout une preuve de notre pouvoir en tant que consommateurs ! La Responsabilité Sociale est aujourd’hui adoptée par de nombreuses entreprises en Europe et Belgique. Dans notre pays, le groupe « Business & Society » rassemble un certain nombre d’entreprises belges qui s’engagent dans une démarche correspondante, et fédère ainsi des acteurs comme Ranstad, Shell, Belgacom ou la VRT. La Commission européenne elle-même, a proposé un livre vert, disponible sur son site internet afin de promouvoir un cadre européen pour la responsabilité sociale des entreprises. Evidemment, chaque entreprise décide de définir et d’appliquer sa définition de la Responsabilité Sociale, dans les limites de ce qu’elle estime viable et bénéfique pour ses activités. Le recours à des organismes de certification extérieure, comme on en trouve aujourd’hui pour les produits biologiques, par exemple, semble donc incontournable tôt ou tard. Il en existe d’ailleurs déjà, tels que le label Ethibel (8) utilisé dans le contexte des placements durables et éthiques. Si la discrimination existe encore et toujours, certaines entreprises s’inscrivent aujourd’hui dans des démarches d’intégration des populations locales, avec leur richesse et leur diversité. Si ces initiatives doivent être soulignées, révélées, encouragées, le législateur ne peut cependant pas s’en contenter. Les conclusions du colloque organisé autour de la recherche sur la discrimination à l’embauche en région bruxelloise étaient pour cela éclairantes : un changement des mentalités de tous, (clients, employés, patrons, membres des syndicats) est encore nécessaire pour que nous puissions apprécier la diversité, et il doit être accompagné et soutenu par la poursuite d’actions des pouvoirs publics. Eléonore Seron
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