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Interview et vidéo d’Anne Stevens, consultante SAP
Parmi les métiers de l’IT, la profession de consultant ERP (Entreprise Ressources Planning ; en
français Progiciels Intégrés) est quelque peu atypique : entre informatique et
gestion, il ne s’agit pas d’un métier de l’informatique au sens strict mais c’est
néanmoins un profil très recherché sur le marché des nouvelles technologies...
Ada a le plaisir de vous présenter Anne Stevens, chef de projet SAP et ERP, qui
nous dévoile tout sur le monde de la consultance de progiciels intégrés... Regardez la vidéo :
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Bonjour Anne. Pouvez-vous nous expliquer ce qu’est SAP ?
SAP est un logiciel de gestion utilisé dans les domaines financiers, les ressources humaines, dans la logistique… C’est un logiciel intégré dans le sens où les différents composants de SAP sont interconnectés. Il existe depuis 1972. C’est aussi un logiciel standard, toutes les fonctionnalités sont dans le logiciel et c’est au consultant à déterminer quelles fonctionnalités doivent être installées, en fonction des besoins du client.
Les fonctionnalités sont "standard" et les clients doivent les accepter, mais bien sûr des demandes de programmation peuvent être acceptées pour des cas particuliers.
En quoi consiste votre travail de chef de projet ?
C’est la gestion du projet de A à Z, la veille constante que toutes les étapes du projet se passent bien. Pour le moment je gère des projets qui se déroulent dans le secteur public et qui généralement prennent en charge surtout le domaine financier. Cela signifie gérer en moyen entre 5 et 10 consultants. Le travail de chef de projet SAP c’est un travail de gestion et de planification avant tout, mais le fait d’avoir été consultante SAP m’aide beaucoup car je connais en profondeur le travail que mon équipe est amenée à faire, et je peux les aider à bien planifier leur travail. Ma semaine est partagée entre plusieurs clients et je me déplace avec mon équipe. Il y a aussi de très longs projets, qui durent plusieurs mois, donc il n’y a jamais vraiment de routine.

Anne Stevens, consultante SAP |
Comment êtes-vous arrivée à ce métier de chef de projet SAP ?
J’ai fait sciences économiques à Namur et j’ai été engagée ensuite par Nixdorf. J’ai commencé par faire de la programmation, puis de l’analyse. Ensuite Nixdorf a été racheté par Siemens, et j’ai commencé à donner des formations SAP. J’ai énormément voyagé, car c’était le début de SAP : j’étais spécialisée dans le domaine financier. Après quelques années, j’ai été contactée par un chasseur de têtes et j’ai démarré chez SAP en tant que chef de projet : c’est un parcours très linéaire, très logique.
Combien de femmes y a t-il chez SAP comme chefs de projet ou en tant que consultantes ?
Au niveau du quota hommes/femmes, on est un groupe de 15 chefs de projets dont 2 femmes. Au niveau des consultants je dirais que la proportion et d’un quart de femmes et trois quarts d’hommes. Les consultantes féminines se concentrent principalement dans des domaines comme les finances et les ressources humaines, tandis que dans les domaines logistiques, on retrouve plutôt des hommes.
A votre avis, pourquoi les femmes sont-elles à ce point sous-représentées dans le secteur informatique et particulièrement dans les postes à responsabilités ?
Pourquoi il y a moins de femmes dans ce monde ? Peut-être parce que ce monde paraît hermétique et technique, ce qui n’est pas du tout le cas. Evidemment il y a l’aspect technique, mais il y a aussi les aspects fonctionnels et relationnels qui sont très importants dans un projet informatique. Par ailleurs, je pense que mes points forts sont principalement mes qualités de communication. Au niveau clientèle, bien sûr, il y a aussi la connaissance du métier, mais je pense que la réussite d’un projet passe au 50% par la communication.
Comment arrivez-vous à gérer une profession à responsabilités et votre vie de famille ?
J’ai deux enfants dont un petit et donc j’ai quelqu’un qui m’aide à la maison tous les jours, qui vient à la maison de 15h30 à 19h, et soit mon mari rentre plus tôt que moi, soit je rentre à cette heure. Par ailleurs, en sortant de sciences économiques avec mon petit copain de l’époque (qui est devenu mon mari), la question se posait "qui va travailler pour ramener de l’argent ?" Mon mari m’a dit "ma chérie, moi je fais l’INSAS, et toi, qu’est-ce que tu fais ?" et moi j’ai dit, "et bien, moi je vais travailler" ! Et tout a commencé comme ça ! La vie s’est toujours passée de la même manière : lui, il a toujours eu ses métiers artistiques et c’est moi qui suis plutôt l’"élément solide" de la famille…
Avez-vous des horaires très contraignants ?
Cela varie en fonction de l’évolution des projets, mais j’ai, en général, de longues journées.
Je pars tôt le matin parce que je respecte les horaires des clients. Actuellement j’ai des clients au Luxembourg et donc je pars de la maison à 7 heures pour être là-bas à 9 heures. Mais il y a parfois des réunions de 16 à 18 heures et donc je rentre à 20 heures.
L’avantage chez SAP est qu’on peut travailler à domicile de temps en temps, par exemple pendants des périodes où l’on doit faire des rapports, des comptes rendus ou lorsqu’on doit lire le contenu d’un document.
On n’est pas lié à des horaires fixes, on est lié à des résultats : si l’on parvient à atteindre ses résultats en travaillant moins, cela ne pose aucun problème.
C’est vrai qu’il faut être très disponible, mais la disponibilité n’est requise qu’à certaines phases du projet, dans la phase de préparation par exemple et en fin de phase, parce qu’il faut avoir la validation du client sur l’implémentation du projet.
Actuellement, je travaille en 4/5 pour avoir la possibilité d’être avec mes enfants le mercredi après-midi, mais je ne veux pas non plus entraver le travail : le projet doit tourner 5 jours sur 7 et ce n’est pas mon 4/5 qui doit retarder quoi que ce soit.
Je prends ma journée de récupération dans la mesure du possible. Il se peut aussi que je prenne un vendredi après-midi pour d’autres raisons, pour être interviewée par ADA, par exemple !
Pensez-vous que ce soit plus difficile pour une femme de travailler dans le secteur informatique ?
Ce n’est pas difficile pour une femme de travailler dans ce milieu, ce qui est difficile c’est la disponibilité, mais cette exigence de disponibilité est la même pour tous, que ce soit pour un homme ou une femme. Je pense qu’aujourd’hui, que l’on soit homme ou femme, le travail familial est partagé. En plus, il y a actuellement beaucoup de divorces dans ma tranche d’âge, et donc la charge familiale est forcément partagée. Je crois que la société civile évolue et la préoccupation de s’occuper des enfants n’est plus liée au sexe. C’est une évolution de la société que l’on ressent beaucoup depuis les cinq dernières années : j’ai des collègues hommes qui me disent "pas de réunions après 17 heures". Ce n’était pas le cas il y a 6 ans, pas du tout. La société civile évolue et les entreprises évoluent avec l’évolution des relations humaines dans sa globalité. Et le fait qu’après le travail une autre vie commence a aussi ses aspects positifs : cela aide beaucoup à relativiser les choses !
Votre société a-t-elle pris des initiatives pour aider son personnel à mieux concilier la vie professionnelle et la vie privée ?
Oui, au sein de SAP, il y a eu une étude de satisfaction du personnel et il en est ressorti des aspects très positifs au niveau de SAP, au niveau de la direction, de l’ambiance de travail etc. Mais l’un des points négatifs était cet équilibre entre la vie professionnelle et la vie privée. Donc au niveau de SAP, ils ont constitué un groupe de travail pour analyser les raisons de ce problème et proposer des solutions. Personnellement, je crois que c’est une question de comportement individuel par rapport au métier : c’est vrai qu’on a les outils pour travailler 24 h/24, on a les connexions, on a les GSM, c’est vraiment au niveau individuel qu’il faut faire la part des choses et dire : "mon travail s’arrête là !".
Quel a été le moteur qui vous a poussée à faire carrière ?
J’ai toujours voulu être indépendante. Je pense qu’actuellement je suis chef de projet grâce à cette volonté d’être indépendante, d’avoir ma vie en dehors de la vie de mon mari et de mes enfants. L’évolution vers la fonction de chef de projet en a été le résultat. Mais je n’ai pas toujours rêvé de devenir chef de projet informatique… Je suis arrivée à l’informatique un peu par hasard et j’ai découvert un milieu enrichissant où j’ai pu évoluer : j’aime ce métier, parce que c’est un métier diversifié, il n’y a jamais de routine, il y a énormément de contacts à la fois avec les collègues et avec l’extérieur. Même s’il n’est pas toujours "relax", j’aime vraiment beaucoup mon boulot !
Quelles sont les différentes étapes d’un projet ?
Il y a d’abord une phase de préparation contractuelle avec le client où l’on essaie de dégrossir le terrain pour déterminer le périmètre du projet, l’organisation du projet, la responsabilité et une première estimation budgétaire qui sera validée par la suite. Cette phase se termine avec un kick-off meeting où tous les participants sont invités et où l’on explique les phases du projet, le planning et on assigne les responsabilités.
On commence par la phase de conception générale du projet, à savoir des interviews pour déterminer les besoins du client. A la fin de cette phase on détermine ce qu’il faut installer, les aspects spécifiques à développer. Quand on a l’accord du client, on détermine le nombre de jours/personne nécessaires à l’implémentation du produit et le planning, le budget et le périmètre du projet.
Ensuite on commence le travail de réalisation. En fonction du domaine, des consultants spécialisés effectuent les paramétrages nécessaires. Outre ce paramétrage, il y a parfois un travail de programmation spécifique, qu’on essaie évidemment de réduire au maximum, car la gestion a posteriori, et notamment les upgrades, devient plus difficile. Cette phase est la plus longue et peut varier de quelques semaines à plusieurs mois, selon le nombre de domaines pris en charge par SAP. Souvent, nous allons substituer SAP à des logiciels déjà existants et donc il faut "reprendre l’historique", c’est-à-dire comprendre comment le travail était pris en charge par ces logiciels.
Une chose très importante aussi, c’est la phase de tests unitaires - c’est-à-dire qu’on teste toutes les fonctionnalités, une par une- et ensuite une phase de tests d’intégration qui permettent de tester tout un flux, par exemple un flux financier et après des flux financiers et logistiques ensemble. Les tests d’intégration permettent aussi de vérifier l’efficacité de l’intégration de différents modules de SAP avec les logiciels préexistants.
Une des compétences requises est la connaissance du métier du client, parce qu’il est important de parler avec le client et de pouvoir comprendre ses besoins et de traduire ses besoins en termes SAP.
Entre-temps, on commence la préparation de manuels de documentation pour la formation à l’utilisateur, qui sont souvent rédigés ad hoc : nous utilisons des "templates" de base et nous les adaptons en fonction des spécificités qui ont été demandées.
Après la phase de réalisation il y a une phase de "dernière préparation" qui va tester tout le plan de démarrage : c’est une simulation de ce qui va se passer au jour d’entrée en fonctionnement du logiciel.
Enfin la phase de mise en production qui se passe normalement en début de trimestre ou dans un autre moment spécifique de l’année. Commence ensuite la phase de support qui varie en fonction de la taille de l’entreprise et du nombre de personnes concernées par l’implémentation du progiciel. Normalement des "key-users" ont été formés en interne afin d’assurer le support aux collègues, mais il arrive que SAP doive prendre la relève et intervenir aussi. Il y a souvent aussi d’autres petites interventions à faire, car on a beau faire les tests, c’est avec la pratique que l’on découvre souvent des détails qui n’avaient pas été prévus. Il y a des projets pour lesquels la phase de démarrage est très rapide et la phase de support est à ce moment plus longue.
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Elena Lanzoni
septembre 2005
Forum de l'article
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