Tout comme les études féministes qui l’ont précédé, l’ensemble hétérogène des théories cyberféministes instaurées dans les années 90 s’intéresse aux nouvelles technologies comme un champ d’expérimentation dans l’articulation des représentations stéréotypées du masculin et du féminin. L’intérêt est double, trouvant un ancrage à la fois d’un point de vue théorique (analyses et critiques de la situation et des représentations qui y sont liées) et (...)
Au cœur de l’univers cyber, intervient la donnée de la virtualité, du "cyber". La cyberhéroïne serait donc, intrinsèquement, un personnage inséré dans une réalité virtuelle. Si l’on suit cette logique, elle serait donc d’abord définie selon un environnement, selon le paysage dans lequel elle évolue, monde virtuel. Généralement représenté de façon futuriste, ce monde existe en soi (Alien IV, Final Analysis) ou cotoie la réalité à laquelle il est relié par un lien (...)
Contrairement à ce que Haraway ou Braidotti pouvaient espérer, la cyberhéroïne dépend de représentations mythiques ancestrales, s’inscrivant dans une lignée de stéréotypes littéraires et visuels qui tiennent plus de Villers de l’Isle-Adam et Jules Verne que de William Gibson. Véritable objet de ‘recyclage’ malgré des spécificités liées au domaine cybernétique, elle se doit d’être intégrée, de façon syncrétique, comme une variante dans une lignée de (...)
Cette idée de ces héroïnes comme nouvelles déesses entre en complète contradiction avec la phrase d’Haraway ; celle-ci, en pensant que les cyborgs échapperont au règne de la représentation de la femme en tant que déesse, semble trouver ici un point de résistance. En réalité, si les héroïnes sont de simples mortelles dans le monde ’réaliste’, elles sont de véritables déesses dans la virtualité. Catherine, simple psychothérapeute, est déifiée aussi bien de façon négative dans le monde de Karl, (...)
Force est de constater que l’imagerie véhiculée par la représentation de ces héroïnes dépend à la fois de formes archaïques et de résistances permettant d’engendrer des créatures mythiques. Qu’en est-il à présent de l’insertion de ces figures dans des structures narratives ? Ces dernières permettent-elles encore aux promesses de mythification d’être viables ?
Une des indéniables sources de satisfaction lors de la vision de ces films en tant que spectatrice est d’abord le positionnement de la (...)
A la fin de ce périple, revenons un instant sur la question de Renata Klein : ces héroïnes participent-elles vraiment au ’mouvement de libération’ de la femme ? Faut-il réellement, comme le suggère Rosi Braidotti, refuser tout renvoi archaïque, faire table rase de toutes les représentations féminines préexistantes pour engendrer la figure unique de la cyberhéroïne ? L’exemple d’Ellen Ripley à cet égard me semble particulièrement parlant. Son parcours retrace l’historique de la condition (...)