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![]() Les conditions de travail dans les entreprises du secteur IT : un secteur women friendly ? Le secteur informatique connait une forte croissance depuis les années 80, avec une pénurie de main d’oeuvre qualifiée dans le secteur. Cette situation de pénurie de personel qualifié a amené la mise en place de conditions de travail particulières, qui ne sont pas faites pour faciliter l’accès des femmes à ce secteur. Ces conditions de travail correspondent à des normes masculines, et les stéréotypes sur les hommes et les femmes perdurent. La question est maintenant de savoir dans quelle mesure cette situation peut évoluer. Le secteur informatique s’est développé avec des taux de croissance très élevés depuis les années 80, alors que la main d’œuvre compétente était insuffisante. Cette situation, associée à des emplois hautement qualifiés et aux mythes de l’informatique, a participé à la constitution de normes d’emploi spécifiques au secteur informatique, qui sont particulièrement fortes dans ce que les Français nomment les SSII : Sociétés de services en informatique et en ingénierie. Si elles représentent seulement une partie des emplois informatiques, ces entreprises spécialisées sont les représentantes du secteur, et servent souvent de « sas » à l’entrée dans ce domaine : un jeune informaticien y travaillera quelques années, en début de carrière, avant d’être embauché par une entreprises utilisatrice (1). Elles jouent donc un rôle important dans la carrière des informaticiens. Les normes d’emploi dans les SSII Dans le secteur informatique, les normes d’emploi, c’est à dire les pratiques répandues à tel point qu’elles sont considérées comme normales et ont une portée prescriptive, recouvrent les aspects suivants (2) :
Ces résultats, issus d’ une recherche française, sont en partie confirmés par l’étude réalisée par la FTU en Belgique (4)
Cette situation se retrouve dans l’ensemble des pays européens, dans toutes les entreprises informatiques, avec des variantes minimales en fonction des différentes traditions nationales en terme de droit du travail. Des postes à temps plein Inutile de tourner autour du pot : les femmes étant encore celles qui assument, dans la plupart des couples, 80 % des taches ménagères, et qui s’occupent des enfants s’il y en a, l’articulation entre une vie professionnelle sans limites, et ces tâches domestiques, relève de la haute voltige. Si les normes d’emploi dans l’informatique supposent en général des salaires permettant de faire réaliser une partie des taches domestiques par une tierce personne, elles restent néanmoins peu compatibles avec les attentes de la plupart des femmes quant au temps de travail. En effet, d’après une étude européenne sur le temps de travail, on constate que si, en moyenne, les femmes salariées en Belgique travaillent actuellement 33.5 heures par semaine (40.4 pour les hommes), leur nombre d’heures idéal serait de 31,1 heures de travail par semaine (36,8 pour les hommes) (5). Les employeurs du secteur informatique seraient-ils disposés à introduire des pratiques de temps partiel dans leurs entreprises ? WWW-Ict tire des conclusions contrastées de ses études de cas en entreprises « là où il existe, le temps partiel est essentiellement féminin dans les services IT, particulièrement chez des femmes en retour de congé maternité, mais il peut limiter sérieusement les opportunités » (6), et « avec quelques exceptions notables, des politiques explicites favorables à la familles sont inhabituelles dans le cas des entreprises rencontrées dans le projet. Certaines compagnies considèrent la famille comme un problème qui distrait les employés de leur travail, et voient les familles comme un problème spécifique aux femmes employées. » En fait, la plupart des employeurs considèrent que les emplois à temps partiels ne sont pas compatibles avec un travail dans l’informatique, invoquant notamment la nécessité d’être toujours disponible pour répondre à une panne, le besoin d’être toujours à jour compte tenu des nouveautés permanentes dans le secteur… Des solutions organisationnelle comme le job sharing (7) portées par certaines entreprises du secteur comme IBM, peuvent jouer un rôle dans le développement du temps partiel dans le secteur, et à priori tout les postes d’informaticiens ne sont pas concernés par des contraintes de disponibilité totale ou de renouvellement permanent des compétences. Quoiqu’il en soit, lors des entretiens d’embauche, les stéréotypes sur le temps partiel des femmes peuvent également jouer contre les femmes souhaitant travailler à temps plein, l’employeur estimant qu’elles voudront certainement travailler à temps partiel à un moment ou à un autre. Formation par les pairs, sur le tas Au-delà de cette quasi-exigence de n’avoir que des salariés à temps plein, d’autres pratiques peuvent jouer en défaveur des femmes dans le secteur informatique. Il s’agit de freins qui découlent des systèmes de fonctionnement mis en place dans les entreprises, sans qu’il soit à aucun moment fait mention des femmes directement. Ce type de discrimination indirecte est lié à une culture et à la mise en place de structures internes dans un milieu essentiellement masculin, et peut rendre le parcours de femmes plus difficile. Un exemple concerne la formation par les pairs, « sur le tas ». Tout le monde s’accorde à dire que l’informatique change en permanence, et que la formation continue est essentielle dans ces métiers. Les entreprises n’ont pas toujours la possibilité de faire suivre des formations à leur salariés, même si elles vendent des services de consultance sur des nouveaux produits : « on forme sur le produit, sur le projet qu’on va donner au salarié. Si par exemple, on ne faisait que du COBOL (langage de programmation), et puis qu’on vous demande du PASCAL, on est prêt à vous donner 3 jours sur Pascal. Et ensuite, hop, on est vendu comme spécialiste du pascal.(…) Ca veut dire que quand on développe un produit, on se forme en même temps (8). C’est pour ça que les journées de travail sont à rallonge, parce qu’on a des échéances précises et il faut qu’à tel moment on ait réalisé telle chose » . La politique des sociétés de services est de donner une formation minimum sur les produits et d’envoyer ensuite les personnes en mission, en considérant qu’elles apprendront sur le terrain, dans le collectif de travail. Si le temps nécessaire à cette formation sur le tas n’est pas intégré dans les calendriers de réalisation des projets ou dans les devis, alors les salariés prennent sur leur temps personnel : « donc, quand on arrive devant le client, c’est l’enfer. Et ça veut dire derrière qu’on passe du temps, de 18 heures à 21, 22, 23 pour … pour comprendre, quoi ! » D’après les personnes interrogées par la DARES, les jeunes informaticiens acceptent ces situations parce qu’ils savent que c’est la meilleure solution pour apprendre leur métier et que cette situation ne durera que quelques années, à une période de leur vie où ils peuvent sacrifier en grande partie leur vie privée à leur vie professionnelle. C’est ici un premier biais, qui peut poser problèmes à des femmes (et plus généralement à toutes les personnes qui apprécient de faire autre chose de leur soirée que des heures supplémentaires non rémunérées.) Mais ce type de formation sur le tas, non formalisée, implique aussi un autre biais pour les femmes : si les formations se font « sur le tas », cela implique qu’elles sont le fruit de partages de compétences entre les travailleurs dans une équipe. Comme le montrent Collet et Ingarao, il s’agit d’une situation où le caractère informel du processus d’apprentissage peut jouer en défaveur des femmes : « l’apprentissage sur le tas entre pairs passe par le fait de formuler une incompétence : ’j’ai besoin d’aide, je ne sais pas faire cela, comment fait tu toi ?’ » Dans le même temps, la culture sexiste qui pose que les femmes sont techniquement incompétentes, engendre la pratique du « test » (’voyons ce qu’elle sait faire’) qui consiste à leur poser des questions complexes, tendre des pièges, pour voir jusqu’où elles peuvent aller. L’incompétence, (réelle ou supposée) d’une femme porte atteinte à l’image du groupe des femmes dans son ensemble (tandis que l’incompétence d’un homme ne touche pas le groupe des hommes). Une ’question bête’ (ou mal posée) sera payée chère en sarcasmes qui sous-entendent que sa place est remise en cause (typiquement ’retourne dans ta cuisine’). En outre, les femmes qui s’estiment compétentes peuvent en venir à se sentir menacées et développer une attitude de rejet, ou du moins de plus grande rigueur, vis à vis de femmes jugées ’incompétentes’. Dans un contexte de faible codification des qualifications, ce sont des images-fantasmes qui jouent le rôle de référentiel de la compétence » (9). Les pratiques autour de la formation ne sont pas volontairement discriminatoires pour les femmes, mais le secteur informatique étant un secteur ou très peu de femmes sont présentes, ces pratiques informelles se construisent sur des normes de relations masculines, qui peuvent défavoriser les femmes. Rémunérations individuelles Les salaires dans l’informatique sont déterminés selon des critères non formalisés, où le statut minoritaire des femmes peut s’avérer défavorable. Les salaires dans les fonctions informatiques, particulièrement dans les sociétés de services en informatique, sont souvent fixés sur la base de négociations individuelles : « concernant les aspects purement salariaux, les augmentations de salaires ne sont pas négociées collectivement : lorsque accord collectif il y a, c’est sur une enveloppe globale qui est ensuite partagée entre les salariés selon des critères de performances individuelles plus ou moins formalisés. » (10) Cette situation implique que les salariés, pour recevoir une augmentation, doivent la demander, et savoir se vendre à titre individuel. La construction sociale des femmes les portant plutôt à être modestes quant à leurs compétences, elles sont moins armées dans ces situations qui demandent une part d’auto valorisation. Discrimination à l’embauche ? Certains employeurs cités dans l’étude de WWW-ICT, ont des références sur le travail des femmes totalement rétrogrades, et ont mis en place, dans les années 80 et 90, des politiques de non-engagement explicite de femmes (un cas notamment en Italie). Des actions positives d’entreprises leaders du secteur. S’il n’y a pas de discrimination intentionnelle à l’embauche, l’image du secteur, et les processus internes de fonctionnement des entreprises, tendent à décourager les femmes d’y entrer, et à freiner ensuite leurs carrières dans les entreprises, voire dans certains cas, à les inciter à quitter le secteur.
On peut enfin espérer que le secteur s’assagira progressivement, qu’il deviendra moins boulimique de nouveauté, et, en modifiant son image, laissera de la place à d’autres formes d’implication professionnelle.
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